REFLEXION

 

Le budô c'est quoi ?

Le budô est une conception moderne qui vise une formation globale de l'homme, mentale et physique, au travers de disciplines traditionnelles de combat. C'est une pratique que chacun peut développer à partir des exercices corporels, en cherchant une certaine forme de perfection. La manière dont certains alpinistes ou skippers pratiquent leur discipline en y engageant leur vie semble proche  de l'idée de voie car, à travers la pratique de techniques physiques exigeantes, ils cherchent à conférer une signification à leur vie dans des expériences où est affrontée la mort.

Quelles sont les caractéristiques de la conception japonaise de la voie ?

C'est le temps de la vie qui constitue la voie, de la naissance à le mort. Dans ce temps, si on associe la pratique des arts martiaux à une amélioration de soi-même,  alors l'idée de budô naît. Pour avancer dans la pratique du budô, il faut de la concentration, de la volonté, de la conviction, voire un esprit immuable, afin de pouvoir persévérer durant des années d'entraînement.

Ce n'est pas parce qu'on pratique avec sérieux une discipline comme le kendo, judo, karate-do... que l'on pratique le budô. C'est lorsque sa pratique de la technique corporelle comporte spontanément la tension vers l'auto-formation de la personne dans sa totalité, celle de la voie, qu'elle devient budô. C'est la manière dont on s'engage dans l'art du combat qui importe.

La tension vers la formation de soi s'appuie sur une sensation corporelle concrète que les japonais nomment le "ki", notion particulière  qui concerne à la fois le corps et l'esprit.

La notion de ki (Japon) ou qi (Chine)

En japonais ce terme recouvre des sensations qui touchent quelque chose au fond de notre être. Le ki c'est l'écoute des sensations corporelles par lesquelles on capte son environnement  en même temps que la façon dont on s'y positionne. Cette sensation s'intensifie dans la mesure où la personne tend à estomper  son moi devant ce qui l'entoure.  Si l'ego se  renforce, cette sensation diminue. En étant attentif à la sensation du ki, on se dissout dans son entourage.

Pratiquer le budô, c'est devenir sensible au ki de son propre corps, puis au ki externe et à celui de l'univers.

Le ki en combat

Il s'agit de faire bouger l'esprit de l'adversaire par le ki émanant de votre personne, le troubler : "Ne gagne pas après avoir frappé, mais frappe après avoir gagné". Le ki reflète le poids de votre être.

Ce qui permet d'influencer l'adversaire, c'est le fait que dans l'acte vous mettiez le poids de votre existence, corps et esprit réunis. Il ne s'agit pas de chercher à vaincre en portant un coup à tout prix, mais de porter un coup avec certitude. Il s'agit donc de construire un combat dans lequel la justesse de la sensation est confirmée par une frappe donnée à coup sûr.

La visée d'un adepte du budô se déplace progressivement d'une préoccupation de technique  gestuelle simple vers un état d'esprit. Cependant, il serait faux de dire qu'il y a une étape où l'esprit seul  domine car, sans la technique corporelle, il n'y a pas d'art de combat.

 

 

Tuer l'ego

En combattant on se plonge dans des problèmes d'égo. Celui qui s'acharne à vaincre est porté par la volonté de dominer les autres pour s'affirmer. Dans la logique  du budô, la volonté de dominer l'adversaire ne peut se réaliser qu'en s'effaçant. Cette contradiction entre ce désir de réalisation de son égo et l'effacement indispensable pour y parvenir amène à une profonde révision de soi.

Si l'on cherche à agir spontanément et justement, il faut libérer l'esprit des entraves de la conscience: de là provient l'enseignement de l'esprit vide. Il faut se détacher de la victoire  si l'on veut l'obtenir, ce qui se rapproche de la maxime "il faut s'apprêter à mourir si l'on veut survivre"

L'acte du combat conduit à une introspection, à une remise en cause qui poussent vers une réorganisation de la personnalité : ne pas se laisser perturber, agir spontanément et justement, déployer  ses capacités au maximum.

Si le centre des préoccupations  était auparavant "combien d'ennemis  tués ? combien de combats gagnés ?", il devient  "comment as-tu vaincu l'adversaire sans le tuer ?"

Le sabre, originellement destiné à tuer l'ennemi  se transforme en "sabre qui fait vivre l'homme" par le fait de renforcer la conscience du poids de l'être.

  d'après Kenji Tokitsu ("budô- le ki et le sens du combat")

 

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