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Beaucoup de pratiquants s'imaginent que l'art martial va leur permettre d'acquérir un corps qui réagit bien, qui obéit et qui se déplace avec aisance. Je ne nie pas que le corps doive apprendre à réagir. Mais ce n'est qu'une partie de l'apprentissage, une partie qui dépend de quelque chose de plus vaste, qui est l'apprentissage de l'introspection, la pratique assidue de l'observation de soi. Pour le meilleur ou pour le pire, notre corps est à bien des égards le produit de notre conscience, selon un processus dont la compréhension passe obligatoirement par l'observation assidue de soi-même pendant la pratique. Il ne sert à rien d'ajouter de l'extérieur toujours plus d'informations, de détails, de pouvoir, etc... au trop-plein qui est déjà là.
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Sentir par le corps qu'il existe un déséquilibre, une disharmonie ou un désordre dans son propre système, ainsi qu'entre le corps et la conscience, constitue un point de départ pour progresser. On peut comparer l'acquisition de cette perception à une conversation entre le corps et la conscience. À mesure que le dialogue s'instaure, l'esprit devient plus clair, plus éveillé, et on commence à percevoir la puissance naturelle, les capacités potentielles, qui étaient restées cachées jusque-là. Au lieu d'ajouter un élément extérieur, de transformer le corps pour l'adapter à ses désirs ou à sa volonté, on se contente de regarder ce qui se trouve déjà dedans. Plus important encore, la conscience elle-même - la manière dont chacun perçoit - commence à changer à mesure qu'on découvre le "vrai" corps, par opposition au corps dont les transformations sont le fruit de la volonté personnelle. L'élément vital, unique, qui fait de l'art martial ce qu'il est, réside dans le fait que le progrès accompli dans l'art est proportionnel à la découverte de ce pouvoir naturel qui, à côté d'un noyau organique, dynamique, préexiste en chaque individu. C'est ce vrai corps qui aide le corps à fonctionner en harmonie, comme un tout.
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En fin de compte, la découverte du vrai corps, de sa valeur et de sa beauté ne doit pas être un objet de comparaison ou de compétition ; elle existe de son existence propre à l'intérieur de chacun. Il en découle tout naturellement que l'étude de l'art exclut la compétition. Il y a quelques années, j'ai eu la chance d'assister à une conférence donnée par un maître zen vietnamien. Lors de la séance de questions-réponses, une femme s'est levée et lui a demandé ce qu'il pensait de la méditation pratiquée par les quakers. Il a répondu "comment voulez-vous comparer la beauté d'une fleur de cerisier à celle d'une rose?" |
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